Participer à un salon est toujours un moment particulier, comme une tranche d'existence extraordinaire.

Je ne fais pas encore partie, hélas, des auteurs qui peuvent vivre de leur plume (et il ne faut pas croire qu'ils sont très nombreux) ; si je ne devais compter que sur mes royalties pour me nourrir, ce serait patates tous les jours, au mieux ;-). Mon train-train quotidien se partage entre enfants, travaux et écriture. Je ne vais surtout pas me plaindre, c'est tout de même mieux que métro-boulot-dodo. Mais le changement de vie sur un salon en est d'autant plus impressionnant.

chambre.jpg J'ai parfaitement conscience de ma chance ; J'ai une maison d'édition attachée au bien-être de ses auteurs et sa responsable événementielle est exceptionnelle. Ainsi, je deviens VIP le temps d'un week-end. Le voyage en train 2ème classe avec la ribambelle de mômes excités qu'il faut canaliser à tout prix se change en 1ère classe silencieuse et confortable avec plateau repas compris (mince, je ne savais pas, le sandwich restera caché dans le sac ;-) ), le bed&breakfast fait place à un hôtel 5 étoiles qui nécessite presque un vélo pour aller jusqu'aux toilettes, le repas familial (tout fait maison tout de même) se transforme en dîner apprêté où la question ne sera pas "qu'est-ce que je fais à manger ?" mais plutôt "qu'est-ce que je peux choisir sans regret parmi tout ça ?", sans parler de l'attention constante portée sur ma soif, ma faim et mon confort d'assise durant les dédicaces par ceux qui courent, qui restent debout et qui brassent les livres toute la journée.

salon.jpg Il y a ensuite les rencontres avec les lecteurs. Écrire est un acte solitaire, personnel, c'est une prise de risque, une mise à nue. Enfermée et isolée, j'invente une histoire qui me plaît avant tout et ensuite j'espère qu'elle plaira au plus grand nombre possible. S'exposer sur un stand devant des centaines de gens qui passent et qui ne s'arrêteront peut-être pas n'est pas toujours une perspective très enthousiasmante de prime abord. Mais à chaque personne qui prend un de mes livres par curiosité, qui rougit de joie de me voir en chair et en os, ou qui part dans des discours interminables parce que son instant de grâce à elle sera de m'accaparer quelques minutes, je me rends compte que je ne suis pas que moi, simple individu sur terre qui n'existe que pour sa famille et ses amis. Et j'apprends ainsi que mon livre a été tellement aimé qu'il est relu régulièrement, que même 13 ans plus tard, certains lecteurs se souviennent de mon nom, que deux petites filles portent le prénom de "Leïlan", ou que la lecture de mon bouquin a permis à un jeune homme d'oublier l'espace d'un instant la souffrance d'avoir perdu son père. Pour les quelques auteurs en herbe qui flânent autour du stand en me regardant comme une personne magique, j'ai toujours envie de dire que ce sont eux qui me rendent magique par l'aura qu'ils me donnent.

champagne.jpg Pour finir, il y a les rencontres entre auteurs, éditeurs et illustrateurs. A force de discuter, le staff et les auteurs bragelonniens sont forcément plus que des collègues, Mais une table de dédicace commune, des pauses, des diners ou des verres partagés donnent aussi l'occasion de croiser quantités d'autres personnes intéressantes ; je suis redevenu lecteur lambda, aussi intimidée qu'un autre, devant Pierre Pelot que j'aime particulièrement, et pour qui il m'a fallu deux ans (et 4 ou 5 restos) pour lui avouer que j'avais dévoré ses livres (pas facile de trouver mieux que "j'ai adoré, c'était super", n'est-ce pas ?) ; j'ai pris des cours à un dîner avec Pierre Bordage, Carina Rosenfeld et Laurent Genefort qui m'ont listé les livres que je devais absolument lire pour avoir une base de S.F. (j'ai pas encore fini) ; j'ai même partagé une chambre d'hôtel et pas mal de rires avec Sophie Jomain et Marika Gallman.

Aujourd'hui, de retour du salon de Genève, je reviens ravie de nouvelles rencontres et j'ai dans la poche une carte de visite qui va peut-être me permettre de contacter, pour un de mes textes, un dessinateur que j'admire depuis très longtemps. Advienne que pourra.

La vie rêvée d'un auteur... hotel.jpg