J'ai commencé à écrire à 21 ans, au hasard et sans filet (voir Portrait). Mes connaissances littéraires dataient du lycée où je n'étais pas une lumière. Leïlan est mon premier texte.

J'ai mis sur le papier l'histoire qui m'obsédait sans me soucier d'un lecteur potentiel, sans même savoir que j'écrivais de la fantasy parce que je n'en avais jamais lue avant le chapitre 10. Je ne connaissais rien des pièges courants et des outils pour les éviter. J'ai su sentir les plus gros, mais mon texte était finalement encore un gros brouillon à son arrivée sur le bureau de Stéphane Marsan. Il ne l'a d'ailleurs pas accepté tout de suite. Il a perçu le potentiel, mais il ne savait pas si j'étais capable de faire toutes les modifications pour le rendre meilleur. J'ai dû faire mes preuves, la nouvelle Contre la Fatalité en est une. Alors, il m'a montré l'utilisation d'un synopsis.

J'avais pensé vous en montrer un avec les personnages ou les morceaux rajoutés après coup. Mais je ne crois pas être un exemple. Je ne suis pas quelqu'un qui sait résumer les choses ; je fais des trilogies : je ne peux pas m'empêcher de m'étaler. Alors plutôt que de vous montrer un mauvais exemple, je préfère vous expliquer les avantages de cet instrument de torture, si vous ne connaissez pas.

Un synopsis est un résumé de chaque partie ou scène du roman avec tout ce qu'on y apprend et tout ce qui s'y passe d'essentiel à l'histoire. C'est une abomination à faire pour moi. Mais le travail en vaut la chandelle. Parce qu'il est possible de se rendre compte que l'on a dit plus qu'on ne le pensait, ou au contraire que l'on n'a pas dit ce qu'on voulait à cet endroit. On remarque aussi les soucis de linéarité d'un texte, ce qui était le cas de Leïlan où dans les premières versions je ne quittais pas Axel d'une semelle, et où aucune scène du château ou d'ailleurs ne venait trancher la ballade jusqu'à Ize. Avec une vue plus générale du texte, on perçoit aussi plus facilement les soucis de rythme (trop de combats dans cette partie, trop de bla-bla dans celle-là) ou l'abandon d'un personnage pendant trop de chapitres. Enfin il est possible de repérer les passages où on peut inclure une scène ou carrément un personnage.

Je n'ai pas attendu d'avoir un synopsis pour faire des rajouts et manipuler mon texte. J'avais déjà repris les dix premiers chapitres en mettant Axel sur une jument et j'avais rajouté un personnage secondaire alors que les trois tomes étaient finis. Mais quel boulot ! Que de tâtonnements et de relectures pour bien vérifier que je n'avais rien oublié ! Le synopsis m'a ouvert la voie du tripotage du texte version industriel. Sous les conseils judicieux de Stéphane Marsan, j'ai cassé la linéarité de la première partie de Leïlan avec des scènes, rajouté des prologues aux trois tomes pour approfondir le poids des divinités, donné une dimension à Enkil qui n'avait que celle d'être un ancêtre glorieux, commencé l'histoire dans les Brumes Infernales (l'original démarrait à la sortie), réécris le premier chapitre à 70% (j'aurai dû le faire à 100%, je le déteste toujours, il a un gros souci de rythme) et rajouté les scylès pour que Korta ne soit pas seul dans son camp de "méchants".

Ces derniers n'ont d'ailleurs pas été une mince affaire ! Ce fut mon choix de créer des alliés avec un pouvoir incroyable qui risquait de bouleverser l'ensemble de l'histoire. S'ils avaient existé dès le début, le roman aurait été tout autre. Je ne pouvais pas réécrire trois tomes, mais je voulais cet ajout. Grâce au synopsis, j'ai pu trouver chaque moment où ils interviendraient, et j'ai endigué au mieux leur effet perturbateur. Au fur et à mesure, les scylès m'ont dévoilé leur pouvoir, leur façon de vivre, pleins de choses que j'ignorais totalement avec la première version. Ce fut un peu frustrant quand même ; j'aurai aimé leur donner toutes les possibilités auxquelles ils avaient droit. Mais Leïlan reste un premier roman. Il gardera des défauts et des regrets. Pourtant, grâce au synopsis, il restera aussi la source de mille découvertes qui me servent encore à ce jour pour devenir un meilleur écrivain autodidacte.